Doctor Who saison 7 : Bye bye Ponds

4

3.0

Hier était diffusé sur les écrans de la BBC le final de mi-saison de la saison 7 de Doctor Who avec The Angels Take Manhattan. Un final qui marque le départ de deux compagnons aimés de tous un peu trop prévisible et bien en dessous de ce qu’on aurait aimé voir.

L’heure est au bilan avant le retour du Docteur sur les écrans pour Noël prochain et sa suite qui marquera les 50 ans de la série. On ne va pas y aller par quatre chemins. C’est triste mais le constat de ce début de saison 7 n’est pas entièrement positif. On est bien en dessous des deux saisons précédentes de Doctor Who malgré un début en fanfare. Scénario bâclés ou déjà-vus, il était temps de dire au revoir aux Pond et d’apprécier l’idée d’une nouvelle compagne. Une jeune femme qui promet d’offrir un peu de fraîcheur à une mécanique rodée et prédictive pour la série de science fiction britannique culte qui a toujours su se renouveler avec le temps. On nous avait promis une saison digne du cinéma. Le directeur de photographie a tenu sa promesse. Côté intrigue, il reste 7 épisodes aux scénaristes pour faire leurs preuves. On débriefe.

Dinosaures, Cyborg et cubes à foison

Après les Daleks, nous avons eu droit au retour des Siluriens dans un très bon épisode, haut en couleurs signé Chris Chibnall avec une intrigue dans la pure tradition de la série. Humour, morale, surprise, voyage spatial, Reine Antique (pharaonique même) et dinosaures… La recette de Dinosaurs on a Spaceship promettait une saison de haut niveau pour Doctor Who. Malheureusement l’effervescence des deux premiers épisodes retombe très vite avec A Town Called Mercy et The Power of Three, deux épisodes agréables mais loin d’être à la hauteur des deux précédents.

Le premier mêlant science-fiction et Far-West, aux faux airs de Firefly, avec une intrigue philosophique similaire à l’épisode  A God complex de la saison 6 , remettant en cause les choix du Docteur et le droit de faire ces choix en fonction de  sa propre vision de la justice. Une thématique déjà étudiée avec brio dans A God complex ( écrit par  le même scénariste), qui ici est expédiée rapidement dans un épisode qui traîne en longueur et dans lequel on déplore la sous-utilisation de Ben Browder, accessoirement icône américaine de la science-fiction dont le talent n’est plus à prouver (Farscape, Stargate SG-1). Ici Ben n’est qu’un piètre personnage secondaire qui disparaît trop prématurément dans un épisode assez plat, visuellement irréprochable mais au scénario simple, voire faible.

The Power of Three est dans la même veine. Son but premier étant d’introduire l’épisode qui va suivre et de remettre en question l’implication des Pond dans la vie du Docteur et ce après autant de temps ensemble. Une nouvelle race d’Aliens est introduite dans l’épisode, ce qu’on aurait pu apprécier, mais de manière beaucoup trop expéditive à travers un scénario bourré de trous, inégal qui rappelle fortement les premières saisons de la série avec un malheureux arrière-goût de pas fini. Un épisode qui jongle entre la vie quotidienne banale des Ponds sur Terre et les extraordinaires aventures de ces derniers avec le Docteur. Un peu maladroit dans son traitement qui laisse très vite deviner comment se déroulera le départ des deux personnages dans l’épisode qui suivra. Deux solutions possibles : soit la mort, soit une intrigue avec un point figé dans le temps qui poussera le Docteur à abandonner malgré lui ses compagnons qui ne le quitteront jamais de leur propre gré. Le père de Rory le dit lui même : Qui peut refuser de voyager dans le temps et l’espace  ? Personne. Et malheureusement, les prédictions se vérifient dans The Angels Take Manhattan.

Bye Bye Ponds

La force des épisodes de mi-saison de Doctor Who règne dans la tension dramatique couplée à la capacité à générer de l’émotion chez le spectateur. Ce fut le cas la saison précédente avec A Good Man Goes to War. Dans The Angels Take Manhattan, l’émotion est bien là : on pleure à chaudes larmes et sans retenue, c’est la fin d’une ère, la fin d’un style et le début d’un autre. Par contre la tension dramatique est presque absente.

Un épisode qui comme A Town called Mercy choisit la facilité. Habitués à mieux et plus complexe, et surtout entraînés par Moffat, les téléspectateurs ont pris l’habitude de tout analyser et de prévoir toute possibilité. Il sont de ce fait beaucoup moins impressionnables qu’ils n’ont pu l’être dans le passé. Avec The Angels Take Manhattan, tout est prévisible et du coup la série perd de sa saveur. C’est bien dommage car on sait de quoi les scénaristes sont capables, en particulier Steven Moffat.

Blink 2.0 à Manhattan

Quand on regarde ce final de mi saison, on ne peut s’empêcher de se référer à l’épisode qui a marqué la genèse d’une des races de monstres les plus effrayantes jamais imaginée dans la mythologie de Doctor Who. On s’attend à un frisson inégalé encore pire que l’épisode qui les a introduit dans la mythologie. Point de renouvellement ici, puisque la structure de l’épisode suit la même mécanique et surtout quasiment la même construction scénaristique que Blink. Avec même en bonus quelques défauts qui laissent le spectateur un peu dubitatif.

The Angels Take Manahattan emprunte trop à Blink. A commencer par ce livre qui aura le même rôle que les easter eggs des dvds dans lequel le Docteur communique avec le « présent » dans Blink. Un outil qui permet au Docteur d’avoir un lien avec le passé et de comprendre ce qui se passe. L’idée bien qu’intelligente a déjà été exploitée avec les mêmes monstres et donc n’étonne même plus. Et tout le reste des évènements perdent de leurs spontanéité puisque faciles à préméditer. L’impression de « déjà-vu » reste ainsi jusqu’à la fin de l’épisode, avec par exemple la lettre de fin lue par Sally Sparrow dans Blink, envoyée par son amie depuis le passé, à laquelle l’appendice écrite par Amy dans le livre fait écho. Tout en émotion bien sur, mais à laquelle elle fait écho néanmoins. Et c’est dommage car on se dit que finalement Moffat, bien qu’extrêmement brillant, a du mal à s’éloigner de ses habitudes avec ce départ de deux compagnons qui auront marqué l’histoire du Docteur. On irait même jusqu’à dire que Moffat, quand il s’agit du Docteur et des Pond a beaucoup de mal à se renouveler. Et c’est bien dommage car il avait signé des épisodes forts et complexes qui resteront dans les annales de la série.

Ce qui a fait la force du scénariste devient désormais sa faiblesse. À trop nous habituer à de faux endings suivis d’un twist pour introduire le véritable ending, les épisodes deviennent de moins en moins surprenants. On est attristés quand Amy et Rory décident de se sacrifier en sautant de l’hôtel  mais en attendant patiemment d’être soulagés avant d’être véritablement déchirés par l’inévitable séparation entre le Docteur et ces derniers. Et c’est exactement ce qui se passe, car on connait la prédisposition à l’ascenseur émotionnel et la torture affective que peut avoir le scénariste envers ses téléspectateurs. Le pire c’est que ça marche à presque 70%, tout du moins sur le plan émotionnel. Et ça, il faut le rendre à Moffat.

In the arms of the Angels

Les Anges, créatures bienveillantes démystifiées depuis la saison 3 avec génie, êtres protecteurs d’origine mystique et biblique désormais maléfiques, n’étaient réapparus depuis Blink qu’en saison 5 dans un double épisode avec frisson et manœuvré avec brio. Des créatures malveillantes qui se sont fait discrètes depuis et dont on attendait le retour avec la garantie et la promesse d’avoir peur. Manque de chance, les créatures ont perdu leur capital épouvante, et ce n’est pas avec quelques apparitions soudaines qu’on espère générer la terreur. Un épisode qui ne présente rien de bien nouveau à leurs égards, à part leur capacité à développer une ferme temporelle dans laquelle ils puisent leur énergie grâce à… la Statue de la Liberté. Un monument, qui, dans une ville qui ne dort jamais, arrive à se déplacer sans que personne ne s’en rende compte. Tranquille, sans soucis, ni même touristes ou habitant qui auraient pu se rendre compte de sa disparition, même dans un New York des années 30  (on a envie de dire bravo t’es trop forte Statue, nos respects madame). Premier défaut de l’intrigue du scénariste. Le second ? Laisser le TARDIS livré à lui-même dans un immeuble qui grouille d’anges qui se nourrissent d’énergie temporelle, pour qui le TARDIS pourrait être le Saint Graal. Ne tentaient–elles pas de prendre cette boite bleue dans l’épisode Blink ? Pourquoi maintenant cela ne pose-t-il plus problème ? Encore une question sans réponse de notre cher showrunner. On a beau aimer l’univers new-yorkais de l’épisode, on est quand même déçus que l’intrigue se résolve seulement grâce à un bon vieux paradoxe temporel avec toutes ces questions qui s’accumulent et cette impression de « Too Easy ».

Il est temps de passer à Clara

Le prochain épisode, le spécial Noël, d’après la bande annonce de fin introduira la prochaine compagne du Docteur, Clara, ou Oswin, au choix dans un univers aux apparences victoriennes. Une nouvelle réjouissante car on sait, grâce à l’avant goût  du personnage présentée dans Asylum of the Daleks, que la jeune femme ramènera fraîcheur et renouveau dans la vie du Docteur. On l’espère fortement pour les intrigues qui suivront. Car même si une fois de plus l’épisode qui la présentait proposait une intrigue en Timeline inversée, similaire à celle de River, le personnage semble assez facétieux pour promettre du bon pour la suite. Un nouveau personnage est toujours une nouvelle source d’imagination pour des écrivains et nous n’en doutons pas. On fait confiance aux scénaristes, qui après ce petit passage à vide ces derniers épisodes vont surement proposer des histoires intéressantes, effrayantes, complexes et touchantes comme ils l’ont toujours fait avec Doctor Who. D’ailleurs Mark Gatiss est annoncé sur certains scripts prochains. Une nouvelle réjouissante. Il ne reste plus qu’à attendre Noël !

Crédit photo ©BBC

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